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La musique française : du romantisme au symbolisme
Le romantisme français
Dès la fin du XVIIIe siècle, un idéal romantique se développe à travers l’Europe, en réaction notamment au rationalisme de l’esprit des Lumières. Mais en France, où les fortes institutions en place défendent vigoureusement le classicisme, ce mouvement culturel et artistique peine à émerger en comparaison avec l’AllemagneL’un des premiers grands inspirateurs des jeunes écrivains allemands est pourtant Jean-Jacques Rousseau, le philosophe parmi les plus influents du Siècle des lumières et de la Révolution française, et dont les Rêveries du promeneur solitaire paraissent en 1782. ou l’Angleterre. C’est Victor Hugo qui donne au romantisme français son manifeste esthétique avec la préface de sa pièce de théâtre publiée en 1827, Cromwell. Et en 1830, la représentation de sa pièce Hernani, dans laquelle il brise les lois du théâtre classiquenotamment la règle des trois unités : unités de temps, de lieu et d’action, déclenche l’un des plus grands scandales de cette époque, la « bataille d’Hernani ». La génération des écrivains romantiques comprend des auteurs tels que Gérard de Nerval, Alfred de Vigny, Alfred de Musset ou Théophile Gautier. En peinture, on peut citer Eugène Delacroix et Théodore GéricaultLe Radeau de la Méduse, créé en 1819, est considéré comme un manifeste de la peinture romantique..
La musique romantique française
Hector Berlioz (1803-1869) est l’une des figures majeures de la musique romantique. En 1830, sa Symphonie fantastique, dont l’argument s’inspire de sa propre histoire, provoque un tollé proche de celui d’Hernani. À travers ses œuvres, il repousse les limites des formes classiques et traite les thèmes privilégiés des romantiques, comme l’expression de soi et l’attrait pour le fantastique, le théâtre de Shakespeare, le mythe de Faust ou le goût pour les sujets antiques. Il crée la musique à programme qui domine une grande partie de la musique romantique européenne et développe considérablement l’orchestre, en l’amplifiant mais surtout en valorisant le timbrecouleur sonore propre à chaque instrument et à chaque voix des instruments. On trouve des prolongements de son œuvre dans la musique de Charles Gounod, de Vincent d’Indy, de Camille Saint-Saëns, de César Franck ou encore de Paul Dukas.
Une autre grande figure du romantisme français est le pianiste Frédéric ChopinPolonais, mais de père français, Frédéric Chopin est arrivé en France à l’âge de 21 ans, en 1831 ; il est également connu pour ses relations tumultueuses avec l’écrivain George Sand. (1810-1849). Il trouve dans les préludes, les études et les polonaises des formes plus souples et plus libres qui lui permettent d’exprimer sa sensibilité hors des schémas classiques.
À propos de l’opéra
L’opéra romantique français – ou « grand opéra » – s’éloigne du style vocalisant et privilégie l’expression des sentiments au travers de grands airs. Le plus populaire de ces opéras aujourd’hui est Faust de Charles Gounod. Mais d’autres compositeurs sont particulièrement présents sur la scène parisienne à cette époque comme Daniel-François-Esprit Auber ou Giacomo Meyerbeerqui mène la forme du « grand opéra » à son apogée en composant de véritables opéras fleuves. Les sujets sont inspirés de fresques antiques, de mythes, du fantastique, et, pendant la seconde moitié du XIXe siècle, ils sont marqués par l’attrait pour l’exotisme et l’orientalisme, avec comme œuvres phares Carmen de Georges Bizet, Lakmé de Léo Delibes ou Samson et Dalila de Camille Saint-Saëns.
Claude Debussy
Aussi, le monde musical français de la fin du XIXe siècle est encore emprunt des idéaux et des grandes formes romantiques, qui ont fait éclater les formats de la musique classique. Mais le langage utilisé, lui, est resté sensiblement le même. Dès ses premiers cours d’écriture, Debussy se montre très réticent envers les règles qu’il faut si scrupuleusement respecter. Il fait preuve d’une indépendance d’esprit sans pareil et d’une ferme conviction que la musique peut s’exprimer autrement. De plus, très sensible à la poésie et à la peinture, il est conscient des nouveaux mouvements artistiques qui apparaissent en cette fin de siècle, et qui n’ont pas de résonance en musique. Il fréquente durant de nombreuses années les salons et les cafés littéraires, et côtoie les jeunes artistes de la « modernité ». Sa musique est couramment associée au mouvement impressionniste. L’incompréhension de certains critiques et musiciens face à la nouveauté de son langage est également très proche de l’hostilité réservée aux premiers peintres impressionnistes par l’académisme qui règne encore sur le monde artistique français. Mais plus que l’impressionnisme, c’est le symbolisme qui a influencé et guidé le travail de Debussy.
Le symbolisme
À la fin du XIXe siècle, le monde connaît de grands bouleversements techniques et moraux. C’est la période de l’industrialisation, de la recherche du profit, des luttes sociales, univers décrit dans les romans d’Émile Zola. La France vient également de connaître la défaite de 1870 et, à partir de 1894, l’affaire Dreyfus divise les Français. Rejetant ce nouveau visage de la société, des artistes se tournent vers un mouvement qui reste proche des principaux aspects du romantisme, mais où règnent l’abstrait, l’imaginaire et le rêve : le symbolisme. Les poètes symbolistes cherchent à exprimer à travers les motsUne langue de l’âme pour l’âme, résumant tout, parfums, sons, couleurs…
- lettre d’Arthur Rimbaud à Paul Demeny, 15 mai 1871 un tout, à établir une correspondancecorrespondance chère à Charles Baudelaire dont les symbolistes se font les héritiers totale entre les arts. C’est dans ce mouvement que s’inscrit Claude Debussy. Ses premières grandes œuvres s’appuient sur les textes des grands poètes symbolistes comme Paul Verlaine, Stéphane Mallarmé et Maurice Maeterlinck. Il y brise les lois de l’harmonie classique, nourrit sa musique de sonorités nouvelles, inspirées de musiques extra-européennes, élimine les appuis rythmiques systématiques, et parvient à créer une véritable musique-poésie. Et surtout, il ouvre les voies de la modernité à la musique du XXe siècle.
L’essentiel
- Le romantisme français s’affirme plus tardivement qu’en Allemagne et en Angleterre en raison de l’opposition des institutions en place.
- La figure la plus importante de la musique romantique française et l’une des plus importantes en Europe est Hector Berlioz.
- L’opéra romantique, ou « grand opéra », perdure jusqu’à la toute fin du XIXe siècle, alors que dans les autres arts, d’autres courants artistiques se sont développés.
- Debussy révolutionne le langage musical de la fin du XIXe siècle et devient le précurseur de la musique moderne. Sa musique est souvent qualifiée d’impressionniste, mais le mouvement qui a inspiré Debussy dans ses premières œuvres est le symbolisme.
Auteure : Aurélie Loyer