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Des Lumières au romantisme : un bouleversement musical
Vers l'autonomie de la musique
Jusqu’au XVIIIe siècle, la musique est liée aux institutions royales et religieuses. Elle a pour fonction d’accompagner le cérémonial de la vie des cours européennes et fait aussi partie de la liturgie. Même la musique d’opéra a pour but premier de rendre hommage au souverain. C’est pourquoi l’artiste n’est pas un créateur autonome. Au contraire, il dépend d’un mécène et de ses commandes. Ses œuvres célèbrent une occasion importante (un mariage, la réception d’un invité de marque) ou agrémentent tout simplement le quotidien du mécène. C’est le cas en particulier à Vienne, capitale des arts à cette époque et ville très mélomane où, plus tard, se fixera Beethoven. De nombreux aristocrates viennois disposent chez eux d’un orchestre ou, plus modestement, d’un quatuor à cordes ou d’une harmonieorchestre d’instruments à vent. Loin d’être immuable, cette situation de dépendance du compositeur va connaître de profonds bouleversements.
De l'esprit des Lumières au Romantisme
Développée en France tout au long du XVIIIe siècle par des savants, la philosophie des lumièresLe terme « lumière » s’oppose à l’obscurantisme et à l’ignorance dans lesquels étaient maintenues de nombreuses personnes. est un courant porteur de réformes sociales et éducatives. Elle prône la tolérance spirituelle et s’enracine dans une compréhension rationnelle de la nature. Le monde est régi par des lois qu’il appartient à la raison de mettre en évidence. L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert en est un des symboles les plus remarquables.
L’art est alors considéré comme une imitation de la nature. Mais de nouveaux courants intellectuels voient le jour en Allemagne dans le dernier tiers du siècle. Ils rejettent cette conception de l’art comme imitation. La connaissance est inaccessible dans son entier car, dans nos vies, l’irrationnel (dans le rêve par exemple) défie la raison. De plus, si la peinture est capable d’imiter la réalité extérieure, la musique, elle, est plutôt capable d’exprimer des émotions et de les susciter chez l’auditeur.
Le romantisme prend sa source dans cette idée : l’art est expression (et non plus imitation). L’artiste aspire à une réalité qu’il se sait incapable de représenter complètement mais que son œuvre (poétique, musicale, picturale) s’efforce de désigner.
La place de l'artiste
Le XIXe siècle hérite de ces notions d’expression et d’indiciblece qu’on ne peut pas dire avec des mots, et favorise le développement de la musique instrumentale. Les artistes bénéficient des apports conjugués de la philosophie des lumières et du romantisme naissant. Bien que différents, ces deux courants permettent la reconnaissance du statut du musicien professionnel. Il n’est plus un domestique mais un individu créateur. Beethoven fait figure de précurseur puisqu’en 1809, il obtient de son mécène une rente à vie pour composer non sur commande mais selon son inspiration.
L’affaiblissement économique de la noblesse européenne et la montée de la classe industrielle bourgeoise vont installer un véritable marché musical et mettre fin au système du mécénat : le concert public payant remplace peu à peu le concert privé aristocratique.
Auteure : Elsa Siffert