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Alborada del gracioso Maurice Ravel
Carte d’identité de l’œuvre : Alborada del gracioso (extrait de Miroirs) de Maurice Ravel |
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Genre | musique pour instrument seul |
Composition | en 1904-1905 à Paris |
Création | le 6 janvier 1906 à la Société nationale de musique, à Paris, par Ricardo Viñes au piano |
Forme | pièce en un seul mouvement |
Instrumentation | piano seul |
Orchestration de Maurice Ravel | |
Composition | en 1918 |
Création | le 17 mai 1919 à Paris par les Concerts Pasdeloup |
Instrumentation | bois : 1 piccolo, 2 flûtes, 2 hautbois, 1 cor anglais, 2 clarinettes, 2 bassons, 1 contre-basson cuivres : 4 cors, 2 trompettes, 3 trombones, 1 tuba percussions : timbales, crotales, triangle, tambour de basque, castagnettes, tambour militaire, cymbales, grosse caisse, xylophone cordes pincées : 2 harpes cordes frottées : violons 1 et 2, altos, violoncelles, contrebasses |
Contexte de composition et de création
Durant la première décennie du XXe siècle, Maurice Ravel connaît une de ses périodes les plus prolifiques et compose de nombreux chefs-d’œuvre. Écrits entre 1904 et 1905, les Miroirs pour piano marquent une étape importante dans la littérature pianistique du musicien. L’œuvre est créée par Ricardo Viñes, fidèle interprète de Ravel, à la Société nationale de musiquesalle Erard.
Selon son auteur : Les Miroirs forment un recueil de pièces pour le piano qui marquent dans mon évolution harmonique un changement assez considérable pour avoir décontenancé les musiciens les plus accoutumés jusqu’alors à ma manière[...].
Parmi les cinq pièces qui composent le recueil, Ravel en transcrit deux pour orchestre. Une Barque sur l’océan suit de peu la version pour piano. L’orchestration d’Alborada del Gracioso, la quatrième pièce, est assez tardive, mais reste une merveilleuse réussite : elle est orchestrée quinze ans après la version originale, et est jouée pour la première fois par l’orchestre Pasdeloup en 1919. Le succès est immense.
Caractéristiques de l’œuvre
Ravel, dont le goût pour les échanges entre piano et orchestre est profond, réalise dans cette pièce un formidable travail de transcription. Reconnu comme un génie de l’orchestration, il sublime la version pour piano en exploitant avec une grande finesse toutes les ressources de l’orchestre. Usant de nombreux rythmes et instruments caractéristiquescrotales, castagnettes, harpes et xylophone, il évoque avec justesse l’Espagne qui lui est chèreNé au pays basque, Ravel a des origines espagnoles par sa mère..
Alborada del Gracioso, qui signifie littéralement « aubade du bouffon », reprend les traits d’un personnage comique du théâtre espagnol. L’aubade est un chant espagnol joué à l’aube pour honorer une jeune femme le jour de son mariage. Ici, la situation satirique raconte l’histoire d’un homme d’âge mur cherchant à séduire une demoiselle qui repousse ses avances. En lui chantant une sérénade grotesque, il se couvre de ridicule.
Après une introduction pleine d’entrain évoquant la guitare à travers les cordes en pizzicatos, l’œuvre se découpe en trois parties :
- la première fait entendre un thème très rythmé, joué par le hautbois et repris en écho par le cor anglais et la clarinette. Une danse effrénée jouée par tout l’orchestre lui succède.
- une tendre plainte jouée par le basson, représentant le bouffon, amène un épisode central. Plein de sensualité, il dépeint les moqueries de la bien-aimée, cruelle envers la déplorable sérénade jouée par son prétendant.
- à la suite de cet épisode, l’agitation de la première partie reprend de plus belle. On peut y entendre les castagnettes et le xylophone qui apportent à l’œuvre l’exotisme et les couleurs chaudes de l’Espagne.
Auteur : Jean-Marc Goossens