Ravel a composé deux versions presque contemporaines de sa très connue Tzigane : la première pour violon et piano, la seconde pour violon et luthéal. Malheureusement, l’unique exemplaire de piano luthéal, construit en 1924, a très rapidement disparu sans laisser de trace. Ce n’est qu’à la fin des années 1970 que le Musée des Instruments de Musique de Bruxelles a découvert être en possession d’un piano Pleyel équipé d’un système luthéal.
Dans la nomenclature de L’Enfant et les sortilèges de Ravel figure une note demandant, à défaut de luthéal, d’employer en certains endroits un piano droit garni de papier entre les marteaux les cordes « pour imiter la sonorité du clavecin». Cette description renvoie à l’un des procédés inventés par Georges Cloetens. Travaillant à l’époque où le violon devient un instrument soliste, ce luthier met au point un modèle de proportion encore en usage de nos jours dans la facture des violons.
Le piano luthéal est un piano préparé sur lequel on adapte deux dispositifs acoustiques, qui produisent des sons proches du jeu du clavecin, d’un tympanon ou d’un cymbalum. Doté de quatre types de jeu différents par combinaison des différents dispositifs, le luthéal conserve les possibilités propres au piano.
Dans le premier dispositif, une pièce métallique vient affleurer la corde qui, en vibrant, ajoute un bruit parasite à la note émise. Le deuxième système bloque la corde au milieu de sa longueur, donnant ainsi la seconde harmonique de la note jouée (un tel principe est proche de celui qui permet de produire des harmoniques sur un violon, un violoncelle ou une guitare).